3/6/2016
Le congrès de la SIA fait le point sur les futures réglementations des voitures diesel
Suite aux nombreux changements confirmés ou encore en discussion, les futures limites d’émissions demandent à être clarifiées. Le congrès « SIA Powertain » est entré dans le vif du sujet dès les premières présentations et la table ronde.
Le traditionnel congrès diesel de la Société des Ingénieurs de l’Automobile (SIA) a réuni à Rouen les 1er et 2 juin dernier plus de 530 spécialistes de 18 nationalités.
La mesure NEDC sera remplacée par le protocole plus stricte WLTP intégrant le cycle WLTC qui impose des vitesses et des accélérations supérieures. L’introduction de cette norme (Euro 6c) n’est pas encore confirmée mais planifiée pour septembre 2017 concernant les nouveaux modèles (septembre 2018 pour le reste des véhicules précédemment homologués). Laurent Benoît, président du Groupe UTAC CERAM a cependant rappelé : « Si l’introduction du WLTP n’est pas encore actée, celle de la mesure sur route RDE est confirmée pour septembre 2017 pour les nouveaux modèles et septembre 2019 pour les autres. » Le RDE (Real Driving Emissions) concerne uniquement les émissions de CO2 et de NOx et son introduction sera notée par l’appellation Euro 6d-Temp. Une nouvelle étape du RDE sera appliquée à partir de janvier 2020 (janvier 2021), avec la norme Euro 6d ou Euro 7.
Le coefficient de conformité (CF - Conformity Factor) a été le cœur du sujet. Le CF est le coefficient multiplicateur des émissions de NOx entre les mesures NEDC en laboratoire et RDE. Il est fixé à 2,1 pour l’Euro 6d-Temp afin de prendre en compte l’élargissement des plages de couple et de régime demandé par le RDE, le dépassement pouvant être 5 à 10 fois supérieur sur les véhicules actuels sans cette restriction.
Aujourd’hui, parmi les constructeurs généralistes, seul le Groupe PSA a équipé l’ensemble de sa gamme du système système SCR de post-traitement des NOx mais l’accélération du calendrier d’application des normes va changer les orientations techniques des autres constructeurs qui ont parfois opté pour le piège à NOx moins onéreux. Alain Raposo, vice-président de l’ingénierie des groupes motopropulseurs et véhicules électriques de Alliance Renault-Nissan, a confirmé : « Tous nos produits utiliseront le SCR pour l’Euro 6d-Temp car il permet d’atteindre les objectifs à la fois d’émissions et de CO2 avec un surcoût limité pour les utilisateurs de diesel durant les prochaines décennies. »
Pierre Macaudière, expert en systèmes post-traitement et carburants pour le Groupe PSA, a présenté les limites techniques de la capacité de traitement du SCR : « Selon l’étude TNO/ICCT, les émissions moyenne de NOx des voitures diesel sont de 500 g/km. L’introduction du CF 2,1 réduira ces émissions de 66% et celles du CF 1,5 de 76%, ce qui représente une forte amélioration de la qualité de l’air en situation réelle. Aller à un CF de 1 n’abaissera que marginalement les émissions – baisse de 8% - et générera en contrepartie des difficultés techniques et un surcoût considérables. »
Pierre Macaudière précise l’obstacle technique : « Une conversion élevée de NOx impose un stockage d’ammoniac dans le catalyseur, surtout à basse température, ce qui engendre un risque d’émissions de cet agent à l’échappement lors des phases d’utilisations transitoires du moteur. » Il ajoute que le problème existe également pour les moteurs essence avec des risques de contraintes thermiques sur le catalyseur, de consommation accrue et d’émissions de CO2 et de particules supérieures. Plusieurs spécialistes ont aussi évoqué le « diesel bashing » régnant actuellement en France et font remarquer que si certains politiques continuent à ne pas vouloir regarder la réalité des faits, il est très probable que l’image du diesel ne soit pas redorée bien qu’il sera devenu globalement plus vertueux que l’essence dès l’Euro 6d.
Pierre Macaudière a aussi dévoilé une information importante : « Le Groupe PSA n’attendra pas 2020 pour produire des véhicules répondant à une limite RDE à CF de 1,5 ; tous nos produits auront ce niveau d’émissions dès septembre 2017. C’est le résultat de notre décision dès 2012 d’anticiper les futures normes. »
Voir notre brève tech « L’avantage technique du SCR de PSA ».
Une conséquence de l’introduction du CF 1,5 est une augmentation de consommation du liquide AdBlue nécessaire au fonctionnement du SCR. La tendance chez les constructeurs est l’intégration d’un réservoir d’environ 20 litres capable de procurer une autonomie correspondant à 5 à 10 pleins de carburant. Des discussions sont en cours pour ajouter des pompes d’AdBlue à côté de celles à gazole dans les stations les plus importantes.
Les voitures diesel offrent aujourd’hui un avantage en termes d’émissions de CO2 comparées à celles à essence. Mickael Weissbäck, ingénieur expert chez AVL : « Le moteur Diesel a un avantage en rendement thermique de 20% sur celui à essence. Son coût de production va augmenter pour répondre aux nouvelles limites d'émissions, particulièrement avec l’introduction du RDE, mais le coût des moteurs essence va aussi croître pour pouvoir les maintenir compétitifs en émissions de CO2. » Des progrès sur les diesel sont encore attendus dans les domaines de la suralimentation et de la combustion, ainsi qu’avec l’hybridation.
Les difficultés techniques de conversion élevée de NOx, les cadres du RDE ou les futurs moteurs Diesel seront présentés dans des prochains dossiers.
Yvonnick Gazeau
Le traditionnel congrès diesel de la Société des Ingénieurs de l’Automobile (SIA) a réuni à Rouen les 1er et 2 juin dernier plus de 530 spécialistes de 18 nationalités.
La mesure NEDC sera remplacée par le protocole plus stricte WLTP intégrant le cycle WLTC qui impose des vitesses et des accélérations supérieures. L’introduction de cette norme (Euro 6c) n’est pas encore confirmée mais planifiée pour septembre 2017 concernant les nouveaux modèles (septembre 2018 pour le reste des véhicules précédemment homologués). Laurent Benoît, président du Groupe UTAC CERAM a cependant rappelé : « Si l’introduction du WLTP n’est pas encore actée, celle de la mesure sur route RDE est confirmée pour septembre 2017 pour les nouveaux modèles et septembre 2019 pour les autres. » Le RDE (Real Driving Emissions) concerne uniquement les émissions de CO2 et de NOx et son introduction sera notée par l’appellation Euro 6d-Temp. Une nouvelle étape du RDE sera appliquée à partir de janvier 2020 (janvier 2021), avec la norme Euro 6d ou Euro 7.
Le coefficient de conformité (CF - Conformity Factor) a été le cœur du sujet. Le CF est le coefficient multiplicateur des émissions de NOx entre les mesures NEDC en laboratoire et RDE. Il est fixé à 2,1 pour l’Euro 6d-Temp afin de prendre en compte l’élargissement des plages de couple et de régime demandé par le RDE, le dépassement pouvant être 5 à 10 fois supérieur sur les véhicules actuels sans cette restriction.
Aujourd’hui, parmi les constructeurs généralistes, seul le Groupe PSA a équipé l’ensemble de sa gamme du système système SCR de post-traitement des NOx mais l’accélération du calendrier d’application des normes va changer les orientations techniques des autres constructeurs qui ont parfois opté pour le piège à NOx moins onéreux. Alain Raposo, vice-président de l’ingénierie des groupes motopropulseurs et véhicules électriques de Alliance Renault-Nissan, a confirmé : « Tous nos produits utiliseront le SCR pour l’Euro 6d-Temp car il permet d’atteindre les objectifs à la fois d’émissions et de CO2 avec un surcoût limité pour les utilisateurs de diesel durant les prochaines décennies. »
Pierre Macaudière, expert en systèmes post-traitement et carburants pour le Groupe PSA, a présenté les limites techniques de la capacité de traitement du SCR : « Selon l’étude TNO/ICCT, les émissions moyenne de NOx des voitures diesel sont de 500 g/km. L’introduction du CF 2,1 réduira ces émissions de 66% et celles du CF 1,5 de 76%, ce qui représente une forte amélioration de la qualité de l’air en situation réelle. Aller à un CF de 1 n’abaissera que marginalement les émissions – baisse de 8% - et générera en contrepartie des difficultés techniques et un surcoût considérables. »
Pierre Macaudière précise l’obstacle technique : « Une conversion élevée de NOx impose un stockage d’ammoniac dans le catalyseur, surtout à basse température, ce qui engendre un risque d’émissions de cet agent à l’échappement lors des phases d’utilisations transitoires du moteur. » Il ajoute que le problème existe également pour les moteurs essence avec des risques de contraintes thermiques sur le catalyseur, de consommation accrue et d’émissions de CO2 et de particules supérieures. Plusieurs spécialistes ont aussi évoqué le « diesel bashing » régnant actuellement en France et font remarquer que si certains politiques continuent à ne pas vouloir regarder la réalité des faits, il est très probable que l’image du diesel ne soit pas redorée bien qu’il sera devenu globalement plus vertueux que l’essence dès l’Euro 6d.
Pierre Macaudière a aussi dévoilé une information importante : « Le Groupe PSA n’attendra pas 2020 pour produire des véhicules répondant à une limite RDE à CF de 1,5 ; tous nos produits auront ce niveau d’émissions dès septembre 2017. C’est le résultat de notre décision dès 2012 d’anticiper les futures normes. »
Voir notre brève tech « L’avantage technique du SCR de PSA ».
Une conséquence de l’introduction du CF 1,5 est une augmentation de consommation du liquide AdBlue nécessaire au fonctionnement du SCR. La tendance chez les constructeurs est l’intégration d’un réservoir d’environ 20 litres capable de procurer une autonomie correspondant à 5 à 10 pleins de carburant. Des discussions sont en cours pour ajouter des pompes d’AdBlue à côté de celles à gazole dans les stations les plus importantes.
Les voitures diesel offrent aujourd’hui un avantage en termes d’émissions de CO2 comparées à celles à essence. Mickael Weissbäck, ingénieur expert chez AVL : « Le moteur Diesel a un avantage en rendement thermique de 20% sur celui à essence. Son coût de production va augmenter pour répondre aux nouvelles limites d'émissions, particulièrement avec l’introduction du RDE, mais le coût des moteurs essence va aussi croître pour pouvoir les maintenir compétitifs en émissions de CO2. » Des progrès sur les diesel sont encore attendus dans les domaines de la suralimentation et de la combustion, ainsi qu’avec l’hybridation.
Les difficultés techniques de conversion élevée de NOx, les cadres du RDE ou les futurs moteurs Diesel seront présentés dans des prochains dossiers.
Yvonnick Gazeau